top of page
Photo du rédacteurefparis

LES VOYAGES ILLUMINENT

LES VOYAGES ILLUMINENT… NOS RESEAUX SOCIAUX



Le tourisme contemporain sert à décorer le musée de l´ego. Le voyage pour se connecter avec soi-même est devenu prétexte pour montrer aux autres qu´on voyage ; par conséquent, si on ne le publie pas sur les réseaux sociaux, ça n´a jamais existé. Si on sort de la maison, Il faut se vanter de ça, il faut le crier, il faut publier d'innombrables photos des endroits qu´on visite comme une ostentation du pouvoir d´achat, de la vaste connaissance du monde et du style de la vie prospère qu´on vit.


Voyager n´est pas déjà, comme jadis, un moyen pour connaitre des endroits inconnus. Ils sont bien loin ces temps où les aventureux devaient s´arranger pour obtenir un moyen de transport, s´inventer un chemin, un toit pour rester à la fin de chaque journée de la traversée ! Imaginez-les craintes des matelots qui ont navigué avec Christophe Colomb, ils n´avaient aucune idée d'où ils allaient arriver, ou, probablement, ils pensaient qu'ils tomberaient à l´arrivée au précipice de la fin du monde ; ou imaginez Marco Polo en traversant un tiers de la planète, de l´Italie à la Chine, avec le risque d´être attaqué à tout instant par des voleurs de grand chemin.


Afin de résoudre ces inconvénients, le moyen âge nous a légué les premiers hôtels, et pendant le XIXe siècle on a développé le concept de tourisme, qui a démontré être une excellente source de revenus, ce qui fait que, déjà au XXIe siècle, le marché du tourisme a sublimé la dynamique des processions et a établi quels sont les endroits qu´on doit visiter, les routes qu´on doit suivre et les hébergements optimaux pour tous les poches et tous les goûts. Ainsi, les nantis pourront se vanter qu´ils sont accueillis dans les hôtels les plus luxueux de Dubaï, tandis que ceux qui veulent se connecter avec la nature indomptée auraient un lieu sécurisé dans les hébergements naturels que les entreprises touristiques ont préparé pour être découvert par les écotouristes. Il n´y a pas d' Amériques à découvrir, ni de lieux secrets à dévoiler. Quand on va en Egypte on sait que nous trouverons (et il vaut mieux qu´on le trouve, parce qu´on y va pour ça) les pyramides de Gizeh. Le tourisme a été chargé de nous saturer de tant d´images que ces endroits ne représentent aucune surprise. Par conséquent, il n'y a pas d'intérêt pour la contemplation du monument artistique, ni la connaissance historique de la région, mais seulement pour la constatation de la présence.


Comme héritiers des processions les religieux qui allaient à Saint-Jacques-de-Compostelle ou à la Mecque, aujourd´hui on voit des processions de milliers de personnes qui suivent les chemins étroits que les services de tourisme ont établi qu´on doit suivre pour chaque endroit. Tous marchent sur la même route, esu même pas et avec des vêtements semblables : des tennis, du chapeaux, des T-shirt et des parasol. Processions d´étrangers qui s´ignorent, mais unis dans le propos d´obtenir des éléments de preuve de leurs voyages. Masses anonymes de gens marchant à Bruges à côté des allemands, des italiens et un immanquable groupe de cinquante chinois prenant des photos à droite et à gauche, en ce même temps on entend de nombreuses langues partout, sauf le flamand, que les belges parlent chez eux, parce que personne ne les comprendra dehors.


Avec ces ardeurs pour établir temps et espaces, on sait maintenant que pour parcourir Cinq Terre (ces cinq petits villages situés dans les versants de montagnes qui sont en face de la mer Adriatique de l´Italie) il suffit d'une journée, pendant laquelle il y aura des trains qui nous amèneront de l´un à l´autre village pour qu´on marche pendant une heure et après on prendra l´autre train pour arriver au village suivant, comme si nous étions dans la visite des sept églises en Semaine Sainte.


Pour être visité, chaque lieu doit se vendre comme quelque chose d'unique et de différent des autres endroits, il doit souligner cette caractéristique et la montrer ad nauseam pour convaincre les étrangers que ça vaut la peine d'y aller. À cause de ça, des cités comme Salzbourg profitent de Mozart, et mettent son image et son nom dans chaque coin, des salles de concerts jusqu’à des chocolatiers autrichiens ―pendant que le cadavre de Amadeus est dans la même fosse commune depuis sa mort―.


Le témoignage inéluctable du voyage c´est la photo, le trophée triomphal de toute expédition, qui doit suivre un rituel déjà établi pour être publié sur les réseaux sociaux. Chaque fois que quelqu´un arrive à un site touristique d´importance ―le site n’est là que pour décorer la photo du touriste― et se prendre une série de photos de plusieurs minutes pour « débloquer » ce site touristique de la liste des endroits que toute personne de bon goût doit visiter. Pour attendre le but, il doit été aidé par ses compagnons de voyage, ceux à qui on demande chaque fois une meilleure habileté comme photographes. Si on voyage seul ou si on veut avoir des photos avec les compagnons de voyage pour montrer qu'on est une personne sociable, il y aura toujours un autre touriste à qui demander de prendre la photo, ou bien, on peut prendre un selfie. Si on a oublié quelque complément, Il y aura toujours des vendeurs chez qui on pourra se procurer le nécessaire pour que l´expérience touristique soi la plus complète possible : selfie-sticks, des batteries de recharge pour les portables, des appareil photo jetables et une grande gamme de souvenirs pour apporter à ceux qui sont restés chez eux parce qu´ils ne pouvaient pas voyager. Les pauvres ! Il faut leur apporter une miniature de la tour Eiffel pour qu´ils ne se sentent pas si mal de ne pas avoir pu y aller, mais ça fonctionne aussi pour les rappeler et les inspirer à la connaitre en direct.

Les photos résultantes seront un Maremagnum de réalités desséchées, dans lesquelles on verra un site très connu au loin et en premier plan le visage d´heureux voyageur qui vient de débloquer cet endroit. Ce qui c´est important n´est pas la photo artistique, mais le témoignage de celui qui a été là.


Cependant, Il ne faut pas perdre de vue que les vacances sont de courte durée, alors, il faut visiter le plus grand nombre d´endroits possibles. À cette fin, les agences de voyage ont trouvé la solution : tours de 20 journées pour emmener les touristes dans les 20 lieux les plus populaires de l´Europe, car on ne peut pas partir du vieux continent sans avoir visité la Tour Eiffel, le Big Ben, le Colisée et le château de Prague. Le seul inconvénient c´est la distance entre eux. Le mécanisme pour le résoudre est simple : remplir un autobus de 60 touristes et toucher les endroits les plus emblématiques de chaque région, on leur donne 15 minutes pour prendre des photos et après retourner à l´autobus pour courir au lieux suivant . À la fin du tour, les touristes auront passé montés et dormis 70% de leur temps dans l´autobus, et l´autre 30% en prenant des photos et en mangeant dans des restaurants pour touristes, qui leur offriront un menu de nourriture générique, ou bien, une version édulcorée des plats de la région.


Les musées sont devenus sets de photographie où ce qui est important ce n´est pas l'oeuvre artistique, mais la photo avec l´oeuvre pour faire que le monde voit qu´on a déjà apprécié l´oeuvre, même si on ne sait pas de quoi il s´agit. L´oeuvre d´art seulement importe au mesure qu´augmente la valeur des photos des touristes. Pour s´adapter à la croissante demande d´espace pour se photographier, le Louvre a une énorme salle où on exhibe la Joconde, autour de laquelle il y a des centaines de personnes mélangées, pas pour voir le tableau, sinon pour se prendre une photo avec cette femme-là au sourire énigmatique. Si quelqu´un veut voir la peinture, il doit le faire sur Internet. En direct on ne peut pas parce qu´on est écrasé par un tourbillon de gens, et l'oeuvre est cachée par les têtes des centaines de touristes qui sont devant l´observateur. Les musées ont assumé le rôle de sets de photographie pour nourrir les réseaux sociaux, les musées des touristes.


Voyager est devenu un prétexte pour remplir l´album postmoderne des voyageurs, son égoteque personnel. Le vieux proverbe qui dit que les voyages illuminent continue à être vrai, mais il a acquis une nouvelle nuance symptomatique de la culture narcissique, égocentrique et critique dans laquelle nous vivons : Les voyages illuminent… nos réseaux sociaux.


Le reste n´importe pas.


Article d'Andrés Gutiérrez Villavicencio

13 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Cartes postales sonores

Les étudiants de la Spin Actualité Médias vous invitent à un voyage sonore. Voici leurs cartes postales sonores. Fermez les yeux et...

Comments


bottom of page